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Veille COVID - Point de situation sur la crise sanitaire mondiale


Directeur de publication : Thomas MESZAROS

Responsable pédagogique : Fabien DESPINASSE


Selon Patrick Allard, consultant permanent auprès du Centre d’analyse, de prévision et de stratégie (CAPS), du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, « l’apparition et la diffusion de variants plus contagieux, ou menaçant l’immunité acquise naturellement ou par la vaccination, rehaussent le seuil de l’immunité collective et en perturbent la progression » [1].

Le variant « Delta » (aussi appelé « indien »), apparu en Inde en avril et encore plus contagieux que son prédécesseur, l’ « Alpha » (dit aussi « britannique »), continue de progresser dans le monde. Dans son sillage réapparaissent de nouvelles restrictions ainsi que des doutes quant aux perspectives de reprise économique à travers le monde. La pandémie a fait près de 4 millions de morts dans le monde depuis fin décembre 2019, selon un bilan établi par l’Agence France-Presse. Les États-Unis sont, officiellement, le pays le plus touché tant en nombre de morts (plus de 600 000), que de cas. Le Brésil, qui compte plus de 518 000 morts, est suivi par l’Inde (399 000), le Mexique (233 000) et le Pérou (192 000).

Plus d’un an et demi après le début de la pandémie, Bruce Aylward, expert de l’OMS et pilote du programme COVAX, s’inquiète d’une nouvelle reprise épidémique incontrôlée et du manque de solidarité des pays riches. Au 17 juin 2021, le système COVAX avait fourni 88 millions de doses dans 131 pays, bien en deçà de ce qui était initialement prévu. De plus, la grande partie des doses promises par le G7 ne sera disponible que fin 2021, voire en 2022. Pour l’expert, il faut « vacciner autour de 60 % de la population mondiale pour stopper l’épidémie ». Au niveau mondial, l’OMS vise une couverture vaccinale de 10 % d’ici à fin septembre, et de 30 % à 40 % d’ici à la fin de l’année. Les 70 % pourraient être atteints mi-2022.


I. Covid-19 dans le monde : contaminations à la hausse, craintes d’une nouvelle vague


En pleine période estivale, au cœur des compétitions sportives rassemblant foule, les autorités de nombreux pays observent une augmentation de nombre de nouvelles contaminations et prennent de nouvelles mesures pour éviter une quatrième voire une cinquième vague.

Face à l’augmentation du nombre de cas au Japon (près de 900 cas dénombrés à Tokyo, le 8 juillet 2021), le gouvernement a pris la décision de remettre en place l’état d’urgence dans le pays du 12 juillet au 21 août. De plus, la grande majorité des épreuves des Jeux olympiques (JO) se dérouleront à huit clos. Ainsi, Tokyo s’inspire des recommandations de l’OMS à l’égard des villes hôtes des derniers matchs de l’Euro de football. En effet, les autorités sanitaires écossaises ont recensé près de 1 991 cas de Covid-19 chez des personnes qui avaient assisté à des événements liés à l’Euro. Les résidents écossais diagnostiqués positifs ont été identifiés comme ayant suivi un ou plusieurs événements liés à l’Euro alors qu’ils étaient contagieux. Ce chiffre comprend les spectateurs qui ont assisté à un ou plusieurs matchs dans les stades de Hampden Park (Glasgow) ou Wembley (Londres), la fan-zone de Glasgow ou des rassemblements informels, dans des pubs ou chez des gens [2].

Après deux mois et demi de baisse, les contaminations augmentent de nouveau en Europe, principalement du fait du variant Delta.

La Russie a enregistré le 30 juin 2021 un record de décès quotidiens dus au Covid-19 pour la deuxième journée consécutive. Selon le décompte du gouvernement, 669 personnes sont mortes en 24 heures (652 décès avaient été établis la veille). Dans ce contexte, le président russe, Vladimir Poutine, a appelé ses concitoyens hésitant à se faire vacciner, à écouter « les experts » et non les « rumeurs » tout en affirmant son opposition à toute obligation vaccinale à l’échelle nationale.

Aussi, avec plus de 2 000 nouveaux cas quotidiens, le Portugal a rétabli un couvre-feu nocturne - de 23 heures à 5 heures du matin - à partir du 2 juillet dans 45 communes, dont Lisbonne. Les cafés et restaurants de 16 villes du pays devront fermer leurs portes à 22h30 en semaine et 15h30 le weekend.

Une étude conduite dans dix pays et publiée dans « Nature » [3] montre que la relance de la pandémie à l’automne 2020 a été largement alimentée par le tourisme estival au sein de l’UE. Cette étude souligne donc, malgré l’accélération des campagnes de vaccinations, de nouvelles craintes pour l’issue de la période estivale.

Ainsi, depuis le 1er juillet, il faut prouver être vacciné, guéri ou testé négatif pour franchir les frontières européennes, en utilisant un « certificat numérique Covid européen », aussi appelé pass sanitaire. Ce pass est gratuit et reconnu par les 27, la Suisse, le Liechtenstein, l’Islande et la Norvège. Le certificat est censé dispenser son titulaire d’un test supplémentaire ou d’une quarantaine à l’arrivée, mais il est toujours possible pour un État membre, après information auprès de la Commission, d’introduire des restrictions si la situation du pays ou de la région de provenance du voyageur se détériore. Le variant Delta a déjà conduit l’Allemagne à ajouter le Portugal – où le variant Delta est devenu prédominant – à sa liste des pays à risques, ce qui interdit presque toutes les arrivées en provenance de cet État. L’Allemagne a d’ailleurs pris la décision que d’éventuelles futures mesures de confinement ne concerneront plus les personnes ayant reçu deux doses de vaccin, « tant qu’il n’y a pas de mutation qui altère la protection, la vaccination complète signifie que des mesures [de restriction] comme celles de l’hiver dernier ne sont pas nécessaires chez les personnes vaccinées ».


Les campagnes de vaccinations sont donc au cœur des stratégies nationales pour lutter contre le virus et des études démontrent leurs effets positifs.

En effet, un rapport officiel de Public Health England [4] démontrent que par exemple, une personne non vaccinée âgée de 50 ans a en réalité presque vingt fois plus de chances de décéder du variant Delta qu’une personne qui est protégée par un vaccin anti-Covid-19. Les chiffres du National Health Service [5] établissent que la vaccination permet de réduire de 80 % (pour une dose) et de 96 % (pour deux doses) le risque d’être hospitalisé pour une forme grave de la maladie.

De plus, alors que le Royaume-Uni est soumis depuis début juin à une hausse des cas due au variant Delta, les formes graves restent peu fréquentes.


Source : Le Monde / Copyright : Le Monde / Utilisation non commerciale


L'explication se trouve du côté de l’efficacité de la campagne de vaccination. Début juillet, 84 % des adultes britanniques ont reçu au moins une dose et 63 % deux doses de vaccin – un tiers avec le vaccin de Pfizer et deux tiers avec celui d’AstraZeneca. Selon des données du gouvernement britannique [7], les deux doses de vaccin ne sont efficaces qu’entre 55 % et 71 % pour prévenir les infections du variant Delta (ce qui explique que les contaminations continuent à monter) mais sont efficaces à 90 % pour prévenir les hospitalisations et à 96 % pour réduire la mortalité.

Des études similaires ont été menées en Israël [8]. Dans le pays où la vaccination est très avancée, une partie des nouvelles contaminations survient chez les vaccinés mais le phénomène était complètement prévisible, et il confirme en réalité la capacité des vaccins à protéger contre l’infection au SARS-CoV-2, et surtout contre les formes graves du Covid-19. Les vaccins actuellement disponibles, aussi efficaces soient-ils pour prévenir les formes graves du Covid-19, ne peuvent protéger 100 % des vaccinés contre une infection. L’efficacité du vaccin de Pfizer-BioNTech est estimée à 95,3% contre le risque d’infection pour les gens complètement vaccinés (deux doses). Ce qui signifie qu’un peu moins de 5 % des vaccinés peuvent tout de même être infectés par le SARS-CoV-2. Le chiffre pourrait augmenter dans le cas du variant Delta, dont on estime qu’il est plus contagieux que le variant Alpha (dominant au moment de l’étude).


II. Le point sur l’épidémie de Covid-19 en France


Depuis le 30 juin 2021, le nombre de rendez-vous pris pour la vaccination « est reparti à la hausse ». Il s’agit d’une nécessité face au taux d’incidence du virus qui, bien que bas (25 pour 100 000 habitants au 8 juillet 2021), marque le pas en France métropolitaine. Malgré les efforts, les scientifiques mettent en garde contre le caractère probable d’une quatrième vague et la nécessité de redonner de l’élan à la campagne de vaccination. Avec 34 904 228 personnes ayant reçu au moins une première injection au 6 juillet 2021, la France a franchi depuis le 28 juin 2021 le cap de 50 % de la population totale ayant reçu une première dose. Un tiers de la population est désormais complètement vaccinée.

Source : Le Monde / Copyright : Le Monde / Utilisation non commerciale


Toutefois, selon un communiqué de l’Académie de médecine [9], la campagne de vaccination, telle que menée aujourd’hui, rend « improbable l’accession au taux de couverture vaccinale de 80 % de la population au mois d’octobre, c’est-à-dire au niveau d’immunité collective nécessaire pour éviter une recrudescence de l’épidémie au quatrième trimestre ».

La crainte du gouvernement est aujourd’hui, comme la majorité des pays du monde, la propagation sur le territoire du variant Delta qui est « 60 % plus contagieux que le variant britannique, qui lui-même était deux fois plus contagieux que la souche initiale ». De plus, selon Santé publique France [10], la France enregistre désormais 2 360 nouveaux cas de Covid-19 par jour, soit une hausse de près de 31 % par rapport à la semaine précédente. Le département des Landes, touché par le variant, a ainsi retardé la levée des dernières restrictions sanitaires.

Ce variant pourrait donc être à l’origine d’une quatrième vague comme le souligne une étude de l’Institut Pasteur [11]. Selon les calculs des auteurs, la France pourrait être confrontée, dans un « scénario du pire », à une quatrième vague avec un pic à 2 500 hospitalisations quotidiennes comparable à celui de l’automne 2020. Ce scénario prend pour hypothèse une couverture vaccinale de 30 % chez les 12-17 ans, de 70 % chez les 18-59 ans et de 90 % chez les plus de 60 ans, et une levée totale des mesures de freinage. Les plus de 60 ans non vaccinés (3 %) seraient les plus touchés avec 35 % des hospitalisations. Les moins de 18 ans non vaccinés (22 %) seraient, eux, le premier moteur de l’épidémie, avec 50 % des contaminations.

Dans un second scénario, les modélisateurs montrent que des mesures bien moins contraignantes qu’un confinement ou un couvre-feu, des tests systématiques par exemple, suffiraient à limiter le rebond épidémique. Pour l’Institut Pasteur, afin d’éviter un le pire scénario, le gouvernement est amené à « mettre la pression » sur la population et à lui faciliter l’accès au vaccin. L’espacement entre deux doses peut par exemple être allongé ou raccourci, de 21 à 49 jours, pour ne pas compliquer les vacances d’été.

Le gouvernement français a également évoqué la possibilité de rendre la vaccination obligatoire pour les soignants si moins de 80% d’entre eux ont reçu une dose d’ici à septembre 2021. A ce jour, seuls 57 % des personnels des Ehpad et 64 % de ceux des établissements de santé ont reçu au moins une dose de vaccin. C’est également la demande qui est faite par une centaine de docteurs dans une tribune du Journal du dimanche du 4 juillet 2021.

La même décision, prise en Italie, ne fait pas débat et les travailleurs sanitaires réfractaires pourraient se voir suspendus de leurs fonctions jusqu’au 31 décembre 2021.


 

[1] Politique étrangère, ALLARD P., « COVID-19 : géopolitique de l’immunité collective », été 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/pe2-2021_allard.pdf

[2] Pour aller plus loin : Le Monde, Editorial, « Un Euro de football inadapté à la pandémie », publié le 6 juillet 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/07/06/un-euro-de-football-inadapte-a-la-pandemie_6087209_3232.html

[3] Nature, « Untangling introductions and persistence in COVID-19 resurgence in Europe », publié le 30 juin 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.nature.com/articles/s41586-021-03754-2

[4] Public Health England, « SARS-CoV-2 variants of concern and variants under investigation in England », publié le 25 juin 2021, (en ligne). Disponible sur : https://assets.publishing.service.gov.uk/

[5] National Health Service, « COVID-19 Vaccinations », mis à jour quotidiennement, (en ligne). Disponible sur : https://www.england.nhs.uk/statistics/statistical-work-areas/covid-19-vaccinations/

[6] Public Health England, « UK Summary », mis à jour quotidiennement, (en ligne). Disponible sur : https://coronavirus.data.gov.uk

[7] Gov.UK, « Scientific evidence supporting the government response to coronavirus (COVID-19) », mis à jour le 2 juillet 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.gov.uk/government/

[8] The Lancet, « Impact and effectiveness of mRNA BNT162b2 vaccine against SARS-CoV-2 infections and COVID-19 cases, hospitalisations, and deaths following a nationwide vaccination campaign in Israel: an observational study using national surveillance data », publié le 5 mai 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)00947-8/fulltext

[9] Académie nationale de médecine, Communiqué, « Pour vaincre la Covid-19, une bonne vaccination vaut mieux que des tests à répétition », publié le 23 juin 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2021/06/21.6.23-Test-payants-vaccination-gratuite.pdf

[10] Santé publique France, « COVID-19 : point épidémiologique du 8 juillet 2021 », (en ligne). Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/

[11] Institut Pasteur, « EPIDÉMIOLOGIE DE SARS-COV-2 DANS UNE POPULATION PARTIELLEMENT VACCINÉE ET IMPLICATIONS POUR LE CONTRÔLE D’UN REBOND AUTOMNAL » publié le 29 juin 2021, (en ligne). Disponible sur : https://modelisation-covid19.pasteur.fr/evaluate-control-measures/impact-partially-vaccinated-population/

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