Par Chiara ALEXANDRE
Directeur de publication : Thomas MESZAROS
Responsable pédagogique : Fabien DESPINASSE
I. Une situation sanitaire mondiale instable
Selon l’Organisation mondiale de la santé [1], 111 419 939 cas confirmés de COVID-19 ont été rapportés dans le monde, dont 2 470 772 décès, au 23 février 2021. Cette semaine, 2,4 millions de nouveaux cas et 66 000 décès ont été signalés dans le monde. Ces chiffres rapportent une baisse par rapport à la semaine précédente pour la sixième semaine consécutive.
Les foyers majeurs de l’épidémie se situent toujours dans la zone Amériques et en Europe. Cette semaine ces régions ont été à l’origine, respectivement, de 43% et 38% des nouveaux cas de Covid rapportés au niveau mondial, et de 52% et 36% des nouveaux décès. Les pays qui signalaient le plus grand nombre de nouveaux cas sont : les États-Unis, le Brésil, la France, la Russie et l’Inde.
Source : Santé publique France / Copyright : Santé publique France / Utilisation non commerciale
Lien de l’infographie : COVID-19 : point épidémiologique du 25 février 2021
Le 29 février 2020, les États-Unis annonçaient le premier mort officiel de l’épidémie. Presque un an après, le 22 février 2021 les États-Unis ont franchi le cap des 500 000 décès dus au Covid-19. L’immunologue conseiller de Joe Biden, Anthony Fauci a déclaré : « nous n’avons rien connu de tel depuis plus de 100 ans, depuis la pandémie de 1918 ». Les États-Unis, qui sont officiellement « le pays le plus touché du monde », tentent, depuis l’élection de Joe Biden de faire face aux crises sanitaire, économique et sociale. Le Président américain, qui dit faire de la lutte contre l’épidémie sa priorité, multiplie la prise de décrets allant du port du masque obligatoire à la mise en place de quarantaines pour les voyageurs. De plus, les députés américains ont approuvé le 20 février 2021 un vaste plan de relance de 1 900 milliards de dollars. Ce plan doit toutefois encore être examiné par le Sénat.
La Nouvelle-Zélande, souvent prise en exemple pour la gestion de la crise sanitaire par sa première ministre, Jacinda Ardern, a reconfiné Auckland, pour au moins 7 jours. La découverte de nouveaux cas de contaminations a suscité l’inquiétude du gouvernement et à partir du 28 février 2021, la population ne pourra se déplacer que pour se rendre à leur travail ou pour des achats de première nécessité. Les écoles et les magasins non essentiels resteront fermés et les déplacements hors de la ville seront limités. Le reste du pays est quant à lui soumis à des restrictions de niveau deux : les rassemblements de plus de 100 personnes sont interdits et le port du masque est obligatoire dans les transports publics. Jacinda Ardern a déclaré regretter que la progression de l’épidémie puisse être reliée au non-respect de la période d’isolement chez les personnes contaminées ou déclarées cas-contact.
En Europe, la situation reste sensible. En Allemagne, alors que les Länder préparent un retour progressif à la normale, l’étude du nombre quotidien de contamination démontre une légère hausse après sept semaines de fort recul. Cette remontée des indicateurs semble être imputée à la hausse de la circulation des variants sur le continent européen. Le 23 février 2021, lors de la réunion hebdomadaire du groupe CDU-CSU, Angela Merkel a déclaré « nous sommes désormais dans la troisième vague ». Certains Länder ont pris la décision de repousser au 7 mars la date de réouverture des écoles mais les personnels de santé demandent des mesures plus drastiques. L’Association allemande de soins intensifs et de médecine d’urgence a appelé les autorités à prolonger au moins jusqu’au 1er avril 2021 les restrictions actuelles en vigueur.
L’Allemagne a ainsi décidé de classer le département français de la Moselle en zone à risque maximal en raison de la circulation des variants. Cette décision va durcir les contrôles à la frontière et des négociations sont en cours pour trouver une solution pour les travailleurs frontaliers.
Depuis plusieurs semaines, le lancement des campagnes de vaccination a transformé la vision de la crise sanitaire à l’échelle mondiale. L’immunité collective mondiale induite par la vaccination semble être au cœur de la stratégie de sortie de la crise sanitaire. Aujourd’hui, la question de la fracture entre pays du Nord et du Sud dans l’accès au vaccin est au cœur de la crise. La solidarité et le multilatéralisme qui ont poussé à la création, par l’OMS en partenariat avec l’Union européenne, du mécanisme ACT-A [2] et de son pilier vaccin COVAX [3], semble être la seule réponse à une potentielle nouvelle crise. Ces initiatives devraient permettre un accès équitable et juste à la vaccination à l’échelle mondiale. Cette semaine, le Ghana est devenu le premier pays du continent africain à recevoir des doses de vaccin par le biais de COVAX.
II. France : ré-accélération de la circulation de l’épidémie
Avec l’apparition des variants, la lecture de la situation épidémique en France se complique. La diversité des marqueurs caractérisant l’évolution de l’épidémie entraîne des confusions et les scénarios d’évolutions se troublent. L’étude a posteriori des effets du couvre-feu démontre que cette mesure a permis une stabilisation de la vitesse de progression épidémique ainsi qu’une baisse de celle-ci sur certains territoires.
Toutefois, le ministre de la santé a insisté sur la dégradation de la situation épidémique bien que cela se produise de manière « hétérogène » sur le territoire. Au niveau national, un nouveau cas de contamination sur deux est dû au variant dit britannique, désormais majoritaire dans plus d’un quart des départements, et 5,6% des contaminations seraient dues aux variants dit sud-africain et brésilien. Cependant, cette situation peut être qualifiée d’ « infradépartementale » et « oblige à une observation attentive » selon les territoires.
Le gouvernement s’est ainsi penché cette semaine sur la situation « préoccupantes » d’une vingtaine de départements métropolitains. Un nouveau confinement généralisé n’est pour l’heure pas envisagé et les actions ciblées par territoire semble être le seul moyen de retarder cette hypothèse. Le gouvernement a ainsi désigné une liste de départements « placés en surveillance renforcée » selon divers critères : niveau d’incidence autour de 250 cas pour 100 000 habitants, part de variant supérieur à 50%, pression hospitalière proche du seul critique et accélération de la circulation virale. Comme pour Nice et Dunkerque, les élus locaux de ces départements prendront part aux concertations avec le gouvernement et de nouvelles mesures pourront être prises avant le 6 mars 2021.
« La stratégie territorialisée est pertinente mais on se demande pourquoi elle n’arrive que maintenant. Les mesures mises en place dans les Alpes-Maritimes et à Dunkerque vont peut-être permettre d’endiguer le rebond, mais pas de faire régresser l’épidémie. » Mircea Sofonea, maître de conférences en épidémiologie et évolution des maladies infectieuses à l’université de Montpellier
La multiplication des cas de contaminations dus aux variants laisse entrevoir une reprise de l’épidémie au cours du mois de mars avec une menace majeure sur les hôpitaux en raison de la saturation d’ores-et-déjà existante des lits dans certaines régions. En Ile-de-France, par exemple, les services de réanimations sont quasiment saturés et le dispositif de régulation a été activé afin de répartir les malades entre les différents hôpitaux de la région.
III. La communauté scientifique entre vaccins et traitement contre le Covid
L’apparition de nouveaux variants du SARS-CoV-2 contraint les laboratoires à adapter leurs vaccins, les États à réexaminer leur stratégie vaccinale et les scientifiques à accélérer la recherche d’un traitement contre la maladie.
L’Agence européenne du médicament a ainsi déclaré le 10 février 2021 avoir demandé aux fabricants des vaccins commercialisés de déterminer si ces derniers offraient une protection contre les trois variants circulant actuellement sur le continent. La Commission européenne a également annoncé la mise en place du plan « Hera Incubator » qui vise à débloquer 75 millions d’euros pour identifier les mutations du virus et permettrait à l’Europe de mettre en place une stratégie allant « de la détection précoce de nouveaux variants jusqu’à la production rapide de masse d’une seconde génération de vaccins si nécessaire » [4].
Au cœur de la lutte contre les variants, l’alliance Pfizer-BioNTech a annoncé proposer une troisième dose de son vaccin aux participants de son essai clinique initial pour évaluer l’efficacité d’un rappel contre les variants et les effets possibles sur un renforcement immunitaire [5].
Le 27 février 2021, les États-Unis ont quant à eux autorisé en urgence la commercialisation d’un troisième vaccin. L’Agence américaine des médicaments a ainsi annoncé que le vaccin de Johnson & Johnson sera utilisé pour la vaccination des personnes âgées de plus de 18 ans. Un communiqué du directeur du centre d’évaluation et de recherche sur les produits biologiques de l’agence, Peter Marks, affirme qu’« après une analyse rigoureuse des données, les scientifiques et médecins de la FDA ont déterminé que le vaccin remplit les critères de la FDA en matière de sécurité et d’efficacité pour une autorisation en urgence ». L’étude des essais cliniques démontre que l’efficacité du vaccin semble être de 85,9 % contre les formes graves du Covid-19 aux États-Unis, et de 66,1% pour toutes régions des essais confondues.
En parallèle des vaccins, les traitements représentent également un enjeu médical pour maîtriser la pandémie. De nombreux traitements semblent à ce jour avoir été écartés par les autorités comme la colchicine, l’hydroxychloroquine ou encore le Remdesivir.
En France, le 25 février 2021, le ministre de la santé a présenté des pistes de « traitements innovants » qui pourraient prévenir l’apparition de formes graves du Covid. Les anticorps monoclonaux ont ainsi reçu le même jour une autorisation temporaire de l’Agence nationale de sécurité du médicament. Ce traitement, déjà autorisé aux États-Unis pour soigner les formes légères à modérées, serait administré « avec prudence » dans un cadre hospitalier pour des « patients âgés de 80 ans et plus qui ont des troubles d’immunité ». L’objectif est de traiter précocement les patients en bloquant la multiplication du virus. Toutefois, la Direction Générale de la Santé affirme en prévention que l’efficacité de ce traitement n’est pas démontrée contre les variants brésilien et sud-africain ce qui peut sembler restreindre son intérêt. De plus, deux études du New England Journal of Medicine et du Journal of the American Medical Association, affirment que ce traitement seul n’agit pas sur la charge virale des patients.
D’autres traitement contre le Covid suscite l’intérêt des scientifiques mais leur efficacité reste encore à démontrer. Des études sur des stratégies de repositionnement thérapeutiques sont encore en cours mais leurs études préliminaires restent à ce jour insuffisantes [6].
[1] Santé publique France, « COVID-19 : point épidémiologique du 25 février 2021 » (en ligne). Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/documents/bulletin-national/covid-19-point-epidemiologique-du-25-fevrier-2021
[2] Pour plus d’informations : Organisation mondiale de la santé, « Dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 », (en ligne). Disponible sur : https://www.who.int/fr/initiatives/act-accelerator
[3] Pour plus d’informations : L’Alliance du Vaccin, « COVAX », (en ligne). Disponible sur : https://www.gavi.org/fr/facilite-covax
[4] Pour plus d’informations : European Commission, « Von der Leyen announces the start of HERA Incubator to anticipate the threat of coronavirus variants » publié le 17 février 2021, (en ligne). Disponible sur : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/AC_21_666
[5] Pfizer, « PFIZER AND BIONTECH INITIATE A STUDY AS PART OF BROAD DEVELOPMENT PLAN TO EVALUATE COVID-19 BOOSTER AND NEW VACCINE VARIANTS », publié le 25 février 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.pfizer.com/news/press-release/press-release-detail/pfizer-and-biontech-initiate-study-part-broad-development
[6] Presse INSERM, « L’ivermectine, nouveau traitement miracle contre la Covid-19, vraiment ? », publié le 26 janvier 2021, (en ligne). Disponible sur : https://presse.inserm.fr/livermectine-nouveau-traitement-miracle-contre-la-covid-19-vraiment/42011/
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