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Veille hebdo Covid – Un an après : les enquêtes sur les origines du virus paralysées

Directeur de publication : Thomas MESZAROS

Responsable pédagogique : Fabien DESPINASSE


I. L’enquête de l’Organisation Mondiale de la Santé


Lundi 29 mars 2021 a été publié le rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur les origines du Covid-19. Cependant, lors d’une présentation des résultats de cette enquête le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreysesus, a critiqué le fait que les experts internationaux avaient eu des problèmes pour « accéder aux données brutes » et beaucoup considèrent que les experts n’ont pas eu assez de latitude pour travailler librement lors de leur séjour à Wuhan. En effet, en février 2021, la Chine avait obtenu la possibilité de coopter les scientifiques et de restreindre leur marge de manœuvre.

Le chef de la délégation des experts internationaux, Peter Ben Embarek, a tout de même voulu tempérer les propos du directeur général de l’OMS en affirmant qu’en Chine comme ailleurs, certaines données ne pouvaient pas être partagées pour des raisons de respect de la vie privée.


« En ce qui concerne l'OMS, toutes les hypothèses restent sur la table. Ce rapport est un début très important, mais ce n’est pas le mot de la fin. Nous n'avons pas encore trouvé la source du virus, et nous devons continuer à suivre la science et à ne rien négliger comme nous le faisons », Tedros Adhanom Ghebreysesus, le directeur général de l’OMS.


L’OMS souhaite ainsi que les études continuent et qu’elles se fondent sur « un partage de données plus large et plus rapide » et sur une plus grande étendue géographique, en Chine et ailleurs. L’étude sur les origines de la transmission du virus à l'homme, est jugée extrêmement importante pour tenter de mieux lutter contre une possible prochaine épidémie.


« Trouver l'origine d'un virus prend du temps et nous devons au monde entier de trouver la source afin que nous puissions collectivement prendre des mesures pour réduire le risque que cela se reproduise », Tedros Adhanom Ghebreysesus, le directeur général de l’OMS.


Le premier rapport privilégie l’hypothèse d’une transmission à l’homme par un animal intermédiaire et estime qu’une fuite du virus d’un laboratoire est « extrêmement improbable ». Toutefois, le directeur général de l’OMS souligne que pour totalement exclure cette possibilité, « cela demande d’enquêter plus avant, probablement avec de nouvelles missions, avec des experts spécialisés ». En Europe, les Vingt-Sept insistent sur « la nécessité de poursuivre les investigations pour étudier les origines du virus et la façon dont il s’est frayé un chemin jusqu’à l’homme » et réclament pour les experts un « accès en temps utile à tous les lieux appropriés, et à toutes les données humaines, animales et environnementales disponibles ». Dans la même optique, les États-Unis et treize autres pays ont exprimé leurs préoccupations quant à l’étude d’experts internationaux sur le fait qu’elle a été retardée de manière significative et n’a pas eu accès de manière exhaustive aux données et échantillons originaux dans une déclaration commune [1].

Ces États ont également mis en évidence la nécessité d’un « nouveau traité international sur la préparation et la riposte aux pandémies ». Cet engagement collectif permettrait « un partage des responsabilités » pour faire face à la crise. La crise sanitaire de 2020 a mis en exergue le fait qu’aucun gouvernement ni aucun organisme multilatéral ne peut, seul, faire face à une situation d’urgence sanitaire de grande ampleur. Il semble ainsi nécessaire de développer des mécanismes de coopération pour prévoir, prévenir, détecter, évaluer et réagir aux menaces de pandémie de manière coordonnée à l’échelle internationale. Les objectifs principaux de ce traité seraient ainsi d’encourager à l’échelle mondiale le dispositif de l’OMS « Accélérateur ACT » qui promeut l’égalité d’accès aux tests, aux traitements et aux vaccins, et vise à apporter un soutien aux systèmes de santé à l’échelle de la planète.

De plus, le traité vise à promouvoir une démarche faisant intervenir l’ensemble des pouvoirs publics et de la société, et renforçant les capacités nationales, régionales et mondiales et la résilience face aux futures pandémies. Pour cela, il est nécessaire de consolider la coopération internationale pour améliorer les systèmes d’alerte, la mise en commun des informations ou encore la recherche. En soi, il s’agirait de mécanismes d’anticipation à l’échelle globale pour ne pas se retrouver dans le cas actuel de l’OMS dont le travail d’enquête est entravé par le comportement de la Chine.


II. France : un nouveau durcissement des mesures


Lors de la dernière semaine du mois de mars 2021 [2], tous les indicateurs épidémiologiques, déjà à un niveau élevé, étaient en nette augmentation. L’incidence a augmenté dans toutes les classes d’âge et la dégradation de la situation sanitaire est observée dans toutes les régions métropolitaines. De plus, la tension sur le système hospitalier, déjà très forte, s’est accentuée.

Au niveau national, la forte augmentation de l’incidence, observée depuis plusieurs semaines, se poursuit avec 258 830 nouveaux cas confirmés, soit presque 37 000 cas en moyenne chaque jour.

Au 1er avril 2021 [3], on dénombrait 8 833 275 personnes ayant reçu au moins une dose de vaccin, soit 12,3% de la population en France. Il est estimé que 92,8% des résidents d’EHPAD ont reçu une première dose de vaccin, et 72,3% deux doses.


Mercredi 31 mars 2021, Emmanuel Macron a annoncé les nouvelles mesures de restrictions visant à freiner la propagation du Covid-19. Sans prononcer un confinement strict, le chef de l’État a annoncé la fermeture des écoles pour trois semaines et des collèges et lycées pour quatre semaines. Les élèves suivront, au lendemain du week-end de Pâques, des cours à distance, avant deux semaines de vacances à partir du 12 avril, pour toutes les zones. La rentrée a ainsi été fixée pour tous le 26 avril en physique pour les écoles et en distanciel pour collèges et lycées.

De plus, les restrictions en vigueur au sein de 19 départements depuis plusieurs semaines ont été étendues à l’ensemble des départements métropolitains. Ainsi, les commerces jugés « non essentiels » seront fermés et les déplacements limités à 10 kilomètres sauf dérogation.

Le Président français a annoncé l’accélération de la campagne de vaccination. Ainsi, celle-ci sera élargie aux personnes âgées de plus de 60 ans le 16 avril, puis à toutes celles de plus de 50 ans le 15 mai et enfin tous les moins de 50 ans à partir de la mi-juin. Cette accélération sera notamment possible grâce à la mise à contribution des hôpitaux d’instruction des armées qui devraient être en mesure d’administrer jusqu’à 50 000 doses par semaine [4]. Le ministère des armées a annoncé que les hôpitaux d’instruction des armées allaient faire passer le nombre de lits de réanimation de 90 lits à une centaine, pour participer à l’effort national d’accroissement de ces capacités.


Le gouvernement français espère donc que ces nouvelles mesures couplées à l’accélération de la campagne vaccinale permettront d’amorcer une décrue des indicateurs laissant entrevoir un progressif retour à la normale à partir de mai 2021. Lors de son allocution, le Président a ainsi annoncé un horizon de six semaines pour « rouvrir progressivement le pays » mais n’a pas présenté d’objectifs chiffrés pour cela. Le décalage entre la prise des mesures et leurs effets complique l’analyse de leur efficacité sur le long terme.

Le gouvernement a tout de même souhaité se prononcer sur la tenue des élections régionales et départementales ainsi que sur le sort du secteur de la culture. A ce stade, le premier ministre affirme que le maintien des élections les 13 et 20 juin 2021 est « privilégié » mais une consultation avec les partis politiques et les associations d’élus sera organisée avant un débat à ce sujet. Enfin, les conditions de reprise des activités culturelles sont à l’étude et un calendrier précis devrait être établi d’ici à début mai. En effet, lors de son allocution de chef de l’État a affirmé « dès la mi-mai, nous recommencerons à ouvrir, avec des règles strictes, certains lieux de culture » promettant la mise en place d’un « agenda de réouverture (…) pour que chacun puisse se projeter avec plus de visibilité dans les mois qui viennent ». Les conditions de cette réouverture sont donc encore à l’étude et plusieurs hypothèses se mettent en place et varient en fonction du niveau de circulation du virus attendu.


III. Vaccin AstraZeneca : retard de livraison, problèmes logistiques, méfiance grandissante à son égard


Le mois de mars 2020 a été rythmé par les débats autour du groupe pharmaceutique AstraZeneca et son vaccin contre le Covid-19. Des problèmes logistiques dans la livraison des vaccins avaient suscité la colère de l’Union européenne et du Royaume Uni. Le laboratoire a livré aux Vingt-Sept 30 millions de doses, au lieu des 120 millions prévues au départ, et 10 millions au Royaume-Uni.

De plus, l’utilisation de ce vaccin avait été interrompu le temps que l’Agence européenne des médicaments (AEM) se prononce sur ses possibles effets secondaires. L’AEM avait finalement jugé que le vaccin était « sûr et efficace » et que « le faible nombre de cas de thromboses » ne remettait pas en cause « le rapport bénéfices/risques ». Des pays comme la France ont progressivement ré-autorisé l’utilisation de ce vaccin mais pour une certaine tranche d’âge : les plus de 55 ans en France, les plus de 65 en Suède et en Finlande. Les Pays-Bas ont également suspendu « par mesures de précaution » ce vaccin pour les moins de 60 ans suite à la détection de cinq nouveaux cas de thromboses touchant des femmes âgées entre 25 et 65 ans. Entre le 19 et le 25 mars 2021, trois nouveaux cas de thromboses atypiques associés au vaccin d’AstraZeneca sont survenus en France selon l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Toutefois, l’ANSM affirme que « le rapport bénéfice-risque du vaccin reste positif, aucun élément n’indique pour l’instant que la vaccination ait provoqué ces troubles ». Le 3 avril 2021, l’agence britannique du médicament a également identifié trente cas rares de formation de caillots sanguins chez des personnes vaccinées à l’aide de ce vaccin dont sept décès. Toutefois, l’agence déclare que ceci n’est « pas inhabituel comparé à d’autres types de vaccins » et ajoute que « les avantages du vaccins (…) continuent d’être largement supérieurs aux risques et le public devrait continuer à recevoir le vaccin quand il est invité à le faire ».

De plus, en mars 2021, le National Institute of Allergy and Infectious Diseases avait exprimé des doutes sur les données de l’efficacité de ce vaccin. En réponse, le groupe avait publié un communiqué de presse [5] contenant de nouvelles données et établissant l’efficacité du vaccin à 76% avec un intervalle de confiance compris entre 68 et 82% après l’injection des deux doses du vaccin. Le communiqué affirmait également que le vaccin préviendrait à 100% les hospitalisations et formes sévères de la maladie.

Ainsi, une certaine méfiance s’est tout de même installée parmi les patients. En France, les médecins déclarent que 30% des patients ont annulé leur rendez-vous en cabinet et il devient difficile de convaincre la liste des éligibles au vaccin. Ces derniers critiquent les paroles contradictoires sur la dangerosité du vaccin qui ont été diffusées dans les médias et affirment que l’adhésion de la population au vaccin a largement reculé en quelques semaines.


Cette méfiance s’ajoute à la liste de problèmes auxquelles l’Union européenne doit faire face. Le 31 mars 2021, l’OMS a dénoncé la « lenteur inacceptable » de la vaccination contre le Covid-19 en Europe [6]. A ce jour, seulement 10 % de la population européenne ont reçu une première dose et 4 % ont été totalement vaccinés alors que le nombre de nouveaux cas progresse sur le continent depuis les cinq dernières semaines.


« Les vaccins sont notre meilleure voie pour sortir de la pandémie. Non seulement ils fonctionnent, mais ils sont aussi très efficaces pour limiter les infections. Néanmoins, le déploiement de ces vaccins est d’une lenteur inacceptable. » Hans Kluge, directeur de l’OMS Europe.


Suite aux autorisations d’utilisation des vaccins de Pfizer, Moderna, AstraZeneca et récemment du vaccin Janssen de Johnson & Johnson, l’Union européenne devrait recevoir plus d’un milliard de doses de vaccins. Il est cependant aisé d’affirmer que pour des raisons logistiques ces doses ne seront pas toute disponible avant la fin de l’année 2021, et la vaccination européenne, se voulant de masse, est en train de prendre un retard considérable. Malgré cela, l’Union européenne et les Vingt-Sept semblent encore réticents à l’autorisation en urgence du vaccin russe Sputink V alors que des pays comme la Hongrie ou encore la Slovaquie n’ont pas attendu l’homologation européenne [7].

 

[1] U.S. Department of State, « Joint Statement on the WHO-Convened COVID-19 Origins Study », publié le 30 mars 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.state.gov/joint-statement-on-the-who-convened-covid-19-origins-study/

[2] Santé publique France, « COVID-19 : point épidémiologique du 1er avril 2021 », (en ligne). Disponible sur : https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/

[3] Covid Tracker, « VaccinTracker : Combien de frnaçias ont été vaccinés contre la Covid19 ? », (en ligne). Disponible sur : https://covidtracker.fr/vaccintracker/

[4] Ministère des armées, communiqué de presse, « EMBARGO SAMEDI 3 AVRIL 2021 à 23H30 - Florence Parly annonce l’ouverture permanente de centres de vaccination dans sept hôpitaux militaires », publié le 3 avril 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.defense.gouv.fr/salle-de-presse/communiques/

[5] AstraZeneca, « AZD1222 US Phase III primary analysis confirms safety and efficacy », publié le 25 mars 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.astrazeneca.com/content/astraz/media-centre/press-releases/2021/

[6] WHO, « Slow vaccine roll-out prolonging pandemic », publié le 31 mars 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.euro.who.int/en/

[7] Pour plus d’informations : IRIS, « L’Europe aura-t-elle besoin de Sputnik V ? », publié le 2 avril 2021, (en ligne). Disponible sur : https://www.iris-france.org/156017-leurope-aura-t-elle-besoin-de-sputnik-v/

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