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Veille hebdo Covid – Le lancement des campagnes de vaccinations

Dernière mise à jour : 24 déc. 2020

Directeur de publication : Thomas MESZAROS

Responsable pédagogique : Fabien DESPINASSE


L’Europe est la région du monde la plus endeuillée par le Covid-19 [1] : les 52 pays et territoires qui la composent déplorent désormais plus d’un demi-million de décès liés au Covid-19. Le continent est redevenu l’épicentre de la pandémie depuis octobre, avec les États-Unis.

En France, l’épidémie a fait plus de 60 000 morts et l’évolution de la situation sanitaire reste préoccupante à l’approche des vacances.


I. La situation épidémique en France et l’évaluation de la gestion de la crise


A. La situation épidémique à l’approche des fêtes


Cette semaine a été marquée par le diagnostic positif du Président de la République au Covid-19. Cette annonce a provoqué l’isolement d’un grand nombre de responsables politiques français et européens.

En France, l’épidémie a marqué une légère « reprise » au cours des derniers jours avec une augmentation des nouvelles contaminations et une légère hausse des entrées à l’hôpital. Sophie Vaux, épidémiologiste, souligne que « nous sommes vraiment sur une augmentation de la circulation du virus, une reprise de l’épidémie ». Le nombre de test de dépistage a également augmenté à l’approche des fêtes de fin d’année, mais Sophie Vaux souligne que la hausse du dépistage n’est pas seule responsable de la croissance du nombre de cas détectés.

Les professionnels de santé constatent quant à eux une forte affluence de français et la demande massive de tests place le système en surchauffe. Partout en France les laboratoires constatent une forte augmentation de la demande, s’arment de nouvelles machines et renforcent leurs plages horaires pour y répondre. Toutefois, nombreux sont ceux qui déplorent la multiplication des tests « pour se rassurer », sans véritable efficacité sanitaire à la clé.


« Les pouvoirs publics veulent montrer à la population qu’ils sont en mesure de tester en déployant des tests antigéniques qui sont très mauvais chez les gens qui n’ont pas de symptômes. On rate un positif sur deux avec ces tests, ce sont des bombes car les gens vont se croire non contagieux », Henry-Pierre Doermann, docteur et président de l’Union régionale des professionnels de santé de Nouvelle-Aquitaine.


Jean-François Delfraissy préconise quant à lui une campagne de dépistage massive début janvier afin de véritablement mesurer la circulation du virus. Le professeur Jérôme Salomon rappelait le 17 décembre que l’hiver est une « saison à haut risque » de contagion, notamment à l’approche des fêtes de fin d’année. Le maintien des mesures restrictives semble donc la seule « solution » face à la crise sanitaire.

La date du 7 janvier reste donc une « clause de revoyure » pour examiner si les conditions sanitaires permettront de rouvrir les lieux culturels. Roselyne Bachelot, la ministre de la culture a précisé travailler sur la réouverture des lieux culturels ne souhaitant pas « recommencer le scénario du 15 décembre, où personne n’a entendu les conditions sanitaires qui avaient été posées ».


B. La multiplication des rapports d’analyse de la gestion de la crise sanitaire


En France, les rapports analysant et détaillant les forces et faiblesses de la gestion de la crise sanitaire se multiplient. Dans les veilles, les commissions d’enquêtes du Sénat et de l’Assemblée nationale [2] ont, à de nombreuses reprises, été abordées. Ces commissions se sont concentrées sur les sujets ayant fait polémiques au début de la pandémie : les masques, les tests et le manque d’anticipation du gouvernement.

Ces dernières semaines, le rapport de la commission d’enquête du Sénat [3] met en exergue un échange d’e-mails entre le directeur général de la santé et Santé (DGS) publique France. Ces derniers attesteraient de pressions de la part du DGS pour empêcher la publication d’un rapport d’expertise d’août 2018 établissant que la France aurait dû avoir à sa disposition un milliard de masques. Ce point avait déjà été soulevé lors des auditions des différents ministres de la santé depuis 2008 mais ce rapport impute directement la pénurie de masques dont a souffert la France à une décision prise en 2018 par le DGS de ne pas renouveler le stock de masques chirurgicaux. Jérôme Salomon se défend d’une quelconque pression exercée, affirmant avoir « lui-même fourni l’ensemble des échanges de mails aux membres de la commission d’enquête du Sénat », dans une démarche relevant d’une « volonté totale de transparence ».

Ce rapport souligne également une impréparation des autorités et de nombreuses erreurs de communication. Toutefois, ce rapport pouvant être considéré comme « très sévère » ne fait pas de propositions pour améliorer l’état de l’hôpital public. De plus, selon des sénateurs comme Laurence Cohen, la responsabilité ne peut être imputé qu’à un seul gouvernement et ce sont les politiques d’économies sur la Santé qui ont mené à cette crise : « les politiques successives de coupes budgétaires ont entraîné un déficit de moyens de protection pour les personnels de santé ». Cette problématique est ainsi directement liée au manque de masque disponible au début de la crise.

A l'issue de leur enquête, les sénateurs ne plaident pas pour ressusciter l'Établissement de préparation et de réponse à l'urgence sanitaire [4] (EPRUS), ce qui reviendrait à démembrer Santé publique France, mais préfèrent que l'agence soit mieux dotée afin d'assurer ses missions, et demandent une « clarification des responsabilités avec la tutelle ministérielle ». Les sénateurs souhaitent ainsi que soit créée une instance nationale d'expertise scientifique permanente et indépendante, qui conseillerait le gouvernement. Les sénateurs se distinguent des députés en ne demandant pas la suppression des ARS mais, au contraire, le renforcement de leur échelon départemental. Ils regrettent également que la Conférence nationale de santé n'ait pas été mobilisée, tout comme la société civile.

En effet, le rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale [5] se concentre lui sur un « pilotage défaillant de la crise », « une sous-estimation du risque » et un manque d’anticipation ». Le rapport détaille ainsi les « failles structurelles » ayant conduit à la crise sanitaire que nous avons connue. « Le manque d’interministériel, de déconcentration et de décentralisation » mis en exergue dans ce rapport ne justifie donc toutefois pas, aux yeux des députés, le besoin de conserver les ARS vivement critiquée tout au long de la crise. Le rapport préconise cependant la création d’un ministre délégué, placé auprès du Premier ministre, chargé de l’anticipation des crises.


Des rapports d’enquête plus précis existent également et mériteraient une étude plus approfondie. Non exhaustivement nous pouvons toutefois citer les retours d’expérience sur divers domaines médicaux des annales françaises de médecine d’urgence [6] ou encore le rapport de la mission relative au contrôle qualité de la gestion de crise sanitaire dirigé par le Général d’armée, Richard Lizurey [7]. Ce dernier rapport établi une liste de recommandations essentielles en gestion de crise. En effet, le rapport souligne par exemple l’importance, en cas de crise d’ampleur de longue durée, « d’élargir le périmètre des décideurs et y inclure des opérationnels, afin de permettre une rotation et un meilleur repos des responsables engagés », ou encore de « mieux identifier les niveaux stratégiques et de conduite au plan national ». Longtemps oublié dans la gestion de la crise, ce rapport met en exergue le rôle essentiel du préfet de département en tant qu’acteur pivot de toute crise d’ampleur appelée à durer et nécessitant des actions locales adaptées. Tous les niveaux décentralisés semblent donc appelés à être mobiliser dans le cadre d’une future crise sanitaire. Ce rapport se concentre également sur l’anticipation au cœur de la gestion de crise et préconise par exemple la réévaluation périodique de l’activité des différentes structures des centres de crise, le développement d’un dispositif interministériel de visioconférence ou encore le développement d’un outil numérique de saisine et de gestion des questions de mise en œuvre opérationnelle, accessible aux préfectures, ARS et ministères.

Un retour d’expérience dense, complet et duquel de nombreux enseignements doivent être tirés semble donc être établi par des acteurs variés.


II. Le lancement des campagnes de vaccinations


Le Royaume-Uni, le Canada, les États-Unis, le Brésil et bientôt la majorité des pays européens lancent des campagnes de vaccinations massives dans l’espoir de mettre fin à la pandémie de Covid. Le 17 décembre, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a effectivement annoncé que la vaccination commencerait dans l’Union européenne (UE) entre le 27 et le 29 décembre avec le vaccin des laboratoires Pfizer et BioNTech.


« D’ici une semaine, le premier vaccin sera autorisé, les vaccinations pourront commencer immédiatement (…). C’est une tâche immense », Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, au Parlement européen, à Bruxelles.


Après avoir examiné l’avis du régulateur et consulté les États, la Commission européenne pourra délivrer son autorisation de mise sur le marché conditionnelle dans l’UE.

L’Espagne a été le premier pays de l’UE à annoncer la date précise du début de sa campagne de vaccination qui commencera donc le 27 décembre, au lendemain de l’arrivée des premières doses dans le pays.

L’Allemagne souhaite également débuter sa campagne de vaccination dès le 27 décembre. En effet, en Allemagne, le ministre fédéral de la santé, Jens Spahn, a d’ores-et-déjà informé la conférence des ministres de la santé de l’approbation et de la fourniture prévues du vaccin de Pfizer et BioNTech.

En France, Jean Castex, le Premier ministre, assure que « transparence totale, vigilance absolue, détermination sans faille seront nos maîtres mots dans cette campagne et dans les semaines et les mois à venir ». Le 16 décembre, le Premier ministre a ainsi précisé les modalités de la campagne de vaccination qui devrait débutée dès la fin du mois de décembre. L’Agence européenne du médicament doit toutefois se pencher, le 21 décembre, sur la demande d’autorisation de ce vaccin. Ce n’est que dans les jours suivant, « le 24, 26, 27 ou 28 décembre », que la commission technique des vaccinations de la Haute Autorité de santé française donnera un avis marquant le début de la première phase de vaccination qui concernera alors « les personnes les plus âgées accueillies dans les établissements comme les Ehpad » ainsi que les personnels les accompagnant. Cette première phase concernera un million de personnes et durera de six à huit semaines. Ensuite, seront vaccinés, dans un deuxième temps, « près de 14 millions de personnes présentant un facteur de risque lié à l’âge ou une pathologie chronique » de même que « certains professionnels de santé ». Le reste de la population sera ainsi visée dans un troisième temps, « à la fin du printemps ». Soulignant les impératifs de transparence, Jean Castex a rappelé que « aucune vaccination n’aura lieu sans que le consentement éclairé ait pu être exprimé ».

La transparence du gouvernement français quant à la vaccination est essentielle. En effet, fin novembre, malgré l’urgence sanitaire, un sondage de l’Ifop [8] indiquait que 59 % des personnes interrogées n’iraient pas, ou probablement pas, se faire vacciner contre le Covid-19 quand ce sera possible. Pour tenter de surmonter cette forte défiance, l’exécutif s’est résolu à se doter d’un comité citoyen associé « à la conception de notre stratégie vaccinale » aux côtés du « comité scientifique vaccin », du « comité des parties prenantes » (professionnels de santé, fédérations d’établissements, associations de patients), et du « comité d’élus » (associations des maires, départements et régions).

Aux États-Unis, un comité consultatif d’expert a voté l’autorisation d’urgence du vaccin de la société Moderna. Après cet avis non contraignant, l’agence américaine des médicaments (FDA) s’est prononcée favorablement sur cette autorisation d’urgence.


Suite aux déclarations de nombreux pays, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et l’Alliance pour les vaccins (GAVI) ont mis en place un mécanisme pour distribuer des vaccins aux pays « défavorisés ». Les premières doses devraient être envoyées dès le premier trimestre de 2021. Cela sera possible grâce au mécanisme COVAX mis en place par l’OMS, qui a « obtenu près de deux milliards » de doses selon Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’OMS. Ce dernier a également expliqué que d’autres doses seraient livrées jusqu’en 2022 ce qui permettrait d’atteindre des niveaux de couverture plus élevés. Certains pays, comme la France et le Canada, se sont également engagés à partager avec le reste du monde d’éventuels excédents de doses de vaccins.

 

[2] Pour en savoir plus : Le Monde, « Comment fonctionne une commission d’enquête parlementaire, comme celle qui analysera la gestion de l’épidémie de Covid-19 ? », le 16 juin 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/16/duree-prerogatives-composition-comment-fonctionne-une-commission-d-enquete-parlementaire_6042988_823448.html

[3] Sénat, « Commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion », le 10 décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : http://www.senat.fr/commission/enquete/gestion_de_la_crise_sanitaire.html

[4] Pour en savoir plus : Ministère de la Santé et des Sports, « l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaire », (en ligne). Disponible sur : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Dossier_de_presse_EPRUS.pdf

[5] Assemblée nationale, « Impact, gestion et conséquences dans toutes ses dimensions de l’épidémie de Coronavirus-Covid-19 », décembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www2.assemblee-nationale.fr/15/missions-d-information/missions-d-information-de-la-conference-des-presidents/impact-gestion-et-consequences-dans-toutes-ses-dimensions-de-l-epidemie-de-coronavirus-covid-19/(block)/68851

[6] Annales françaises de médecine d’urgence, « Crise Covid-19 », Volume 10 / Numéro 4-5, Septembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://afmu.revuesonline.com/articles/lvafmu/abs/2020/05/contents/contents.html

[7] Gouvernement.fr, « Rapport de la mission relative au contrôle qualité de la gestion de crise sanitaire », juin 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2020/11/mission_controle_qualite_de_la_gestion_de_crise_sanitaire_-_v14.pdf

[8] IFOP, « LES FRANÇAIS ET LE COVID-19 : CONFIANCE DANS LE GOUVERNEMENT ET INTENTION DE SE FAIRE VACCINER », le 30 novembre 2020, (en ligne). Disponible sur : https://www.ifop.com/publication/les-francais-et-le-covid-19-confiance-dans-le-gouvernement-et-intention-de-se-faire-vacciner/

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