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Veille hebdo Covid – Le début d’une reprise épidémique mondiale ?

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Directeur de publication : Thomas MESZAROS

Responsables pédagogiques : Jean-Luc LAUTIER & Antoine CRÉTIEN

Dans le monde, la pandémie de Covid-19 a fait plus de 978 448 morts depuis la fin de décembre 2019, selon un bilan établi jeudi 24 septembre par l’Agence France-Presse.

I. Vers un reconfinement mondial progressif ?

Le regain de l’épidémie semble désormais incontestable dans de nombreuses régions du monde et cela incite les gouvernements à durcir leurs mesures sanitaires préventives. De nombreux pays optent pour un reconfinement partiel.

Le confinement de six semaines de Melbourne en Australie a été prolongé jusqu’au 28 septembre après une estimation insuffisante de la baisse du nombre de nouveaux cas. Mardi 15 septembre, la commune de Ruili en Chine a été reconfinée et l’ensemble des commerces de la commune sont fermés. Aux États-Unis la situation sanitaire est encore critique. Rapporté à la population, le coronavirus tue chaque jour quatre fois plus dans le pays qu’en Europe. À six semaines de l’élection présidentielle, les États-Unis ont dépassé le seuil de 200 000 décès attribué au Covid-19. Dans le pays, la décision de rouvrir ou non les écoles à la rentrée scolaire est prise localement, par les États, les comtés, ou même les villes et cela aura un fort impact sur l’économie américaine.

Source : Santé publique France / Copyright : Santé publique France / Utilisation non commerciale

La communauté scientifique s’accorde sur la qualification de la situation européenne mais pas sur sa gestion de la crise. Le Professeur Raoult affirme qu’en Europe, « il y a un phénomène particulier qui est l’augmentation du nombre de cas diagnostiqués sans augmentation de la mort ». Il insiste sur la nécessité de limiter le maniement « de la peur et des idéologies » dans l’analyse de la situation sanitaire en France et dans le monde. Cette discordance entre la positivité des tests et le taux de mortalité s’observe partout en Europe et l’épidémiologiste Antoine Flahault qualifie cela de « situation paradoxale ». Ainsi, un peu partout en Europe, on se prépare à faire face à une « seconde vague » bien que des spécialistes considèrent qu’on ne pourra utiliser ce terme que lorsque les courbes des nouveaux cas et de la mortalité augmenteront simultanément comme ce fut le cas au mois de mars.

Des mesures restrictives se mettent donc également en place en Europe. En Espagne, où la propagation de l’épidémie semble encore accélérer, les autorités ont optées pour des mesures de confinement ciblées dans les zones les plus touchées par l’épidémie. Près d'un million d'habitants de la région de Madrid sont donc depuis lundi, et pour deux semaines, priés « de rester chez eux la majorité du temps ». Les quartiers affectés par ces restrictions présentent un taux de contamination supérieur à 1.000 cas pour 100.000 habitants sur les deux dernières semaines. Les habitants ont interdiction de quitter leur quartier sauf pour des raisons bien précises (aller travailler, étudier ou se rendre chez un médecin).

Concernant la Grande-Bretagne, le Pays de Galles a mis en place, mardi 8 septembre, son premier confinement local, interdisant les entrées et sorties du comté de Caerphilly au moins jusqu’au mois d’octobre. Le Royaume-Uni a relevé lundi 21 septembre le niveau d'alerte mesurant l'évolution de l'épidémie face à la menace d'une deuxième vague. Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a confirmé jeudi la fermeture obligatoire à 22 heures des pubs, bars et restaurants et a lancé une application de traçage des cas de nouveau coronavirus, quatre mois après la date initialement prévue.

L’Allemagne est elle aussi sur le qui-vive face à une résurgence des nouvelles infections ces dernières semaines bien que la situation ne soit pas encore alarmante. La Bavière reste particulièrement touchée et a décidé de durcir ses restrictions à Munich. Le port du masque devient donc obligatoire dans une partie du centre-ville et le droit de se réunir sera de nouveau limité. En Italie, la région de Naples, a rendu jeudi obligatoire le port du masque sur l’ensemble de son territoire et Vincenzo De Luca, son président, n’exclut pas des mesures encore plus restrictives en fonction du développement de la situation.

En Belgique cependant, les autorités ont pris la décision d’assouplir certaines restrictions malgré la hausse des contaminations. Cette décision, qui prend le contre-pied des autres pays européens, surprend et divise la communauté scientifique. Toutefois, les autorités belges se fondent sur un principe simple : « mieux vaut des mesures douces acceptées par une large part de la population que des décisions strictes suivies par une minorité ». Ainsi à partir du 1er octobre, le port du masque ne sera obligatoire plus que dans les espaces publics « extrêmement fréquentés ».

II. Une situation épidémique « globalement dégradée » en France

Bien que les niveaux épidémiologiques soient encore loin de ceux des mois de mars et avril, les indicateurs attestent une reprise incontestable de l’épidémie. Les professionnels de la santé ne s’attendent pas à une deuxième vague de la même ampleur que la première, mais tout de même à une reprise engendrant le risque de voir les capacités d’accueil hospitalières à nouveau submergées.

Cette semaine, après l’annonce d’une situation épidémique « globalement dégradée », la France a connu une « avalanche » de nouvelles restrictions contre le Covid-19. La propagation du virus continu de s’accélérer en France et 69 départements ont désormais franchi le seuil d’alerte fixé par le gouvernement et enregistrent un taux d’incidence supérieur à 50 nouveaux cas pour 100 000 habitants. Le gouvernement s’en remet donc au troisième pilier de sa stratégie et des mesures différenciées sont prises selon les territoires. Dans ces territoires, où la circulation du virus est plus active que dans le reste du pays, les préfets sont autorisés à prendre des mesures pour limiter le nombre de contaminations. Dans ces zones, graduées en trois niveaux d’alerte, si plus de 60 % des lits de réanimation disponibles sont occupés par des patients Covid, les territoires concernés passeraient en « état d’urgence sanitaire ».

Dans les « zones d’alerte » les mariages, événements associatifs, ou tout regroupement auront une jauge établie à moins de 30 personnes que devront respecter les salles des fêtes et autres établissements recevant ce type d’événements. Dans les « zones d’alerte renforcée » une série de mesures seront appliquées dès samedi, après concertation des préfets et élus locaux. Ces mesures iront de l’abaissement de la jauge des rassemblements à 1 000 personnes, à la fermeture des bars au plus tard à 22 heures. Les restaurants ne sont à ce stade pas concernés. Enfin, les « zones d’alerte maximale » (la Guadeloupe et la métropole d’Aix-Marseille) se caractérisent par un taux d’occupation des lits de réanimation par des malades du Covid supérieur à 30 % et les nouvelles interdictions y sont drastiques : fermeture totale des bars et restaurants, des établissements recevant du public, exceptés les théâtres, musées et cinémas. Le télétravail est vivement recommandé là où il est possible. Les élus d’Aix-en-Provence et de Marseille, dénoncent une décision « unilatérale, inadaptée et injuste » et des actions de contestations sont annoncées. Quinze jours après que le premier ministre ait prôné la concertation avec les collectivités et les acteurs économiques locaux, la décision unilatérale de fermer les bars et les restaurants dès le samedi 26 septembre déclenche la colère d’une partie des élus et des professionnels.

Le lendemain de l’annonce de ces nouvelles mesures et face à l’évolution de la situation sanitaire s’approchant de celle connue au printemps dernier, le Premier ministre a appelé à la responsabilité « nécessairement collective » des français. En effet, il a tenté d'expliquer la stratégie gouvernementale de « riposte graduée et différenciée selon les territoires » affirmant que toutes les mesures visent à éviter la saturation des services de réanimation et un reconfinement général.

Source : Compte gouvernemental Jean Castex / Copyright : Compte gouvernemental Jean Castex / Utilisation non commerciale

Lien de l’infographie : Jean Castex Twitter

Toutefois, l’urgence sanitaire justifie-t-elle qu’on s’exonère de tout débat public ? Pour Karine Lefeuvre, docteure en droit spécialisée dans le droit et l’éthique de la protection des personnes, la gestion de la crise en matière de démocratie sanitaire est un vrai paradoxe. Au cœur de l’épidémie, la recherche de l’expression des personnes a été mise en sommeil et la population n’a pas été impliquée dans le processus de gestion de crise.

« Dans le domaine de la santé, prendre en compte l’avis du citoyen, de façon structurée, représentative et transparente, est un levier puissant pour reconstruire la confiance. La population est mûre pour participer à des exercices de démocratie participative mais il faut trouver le bon modèle. » Karine Lefeuvre, vice-présidente du Comité consultatif national d’éthique.

La crise sanitaire a joué un rôle de révélateur des besoins en matière de concertation et la démocratie en santé mériterait une étude plus approfondie dans les semaines à venir.

III. Les dernières avancées de la course au vaccin

Une tribune du journal Le Monde écrite par Pauline Londeix et Jérôme Martin, cofondateur de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament et Els Torreele docteur ès sciences et ancienne directrice de la campagne Access de Médecins sans frontières, affirme que « la course au vaccin peut compromettre toute réponse adéquate à la pandémie ». L’accélération des procédures de recherche en Chine, aux États-Unis ou encore en Russie ne semble pas être un modèle pertinent dans la recherche d’outils indispensables à la lutte contre la pandémie. À ce jour la recherche semble loin des promesses faites par de nombreux leaders internationaux et la course au vaccin apparait comme un satisfecit des stratégies de dominations géopolitiques ou encore financières des multinationales pharmaceutiques. Ainsi, la logique de concurrence semble prendre le dessus dans la course au vaccin et encourage l’opacité des échanges avec les laboratoires pharmaceutiques et l’absence de concertation entre les différents acteurs.

La course aux vaccins a pris un tour très politique aux États-Unis à l'approche de l'élection présidentielle. La société américaine de biotechnologie Moderna qui mène, aux cotés de Pfizer, un essai clinique de phase 3 pour un vaccin expérimental contre le Covid-19, a publié en fin de semaine dernière le protocole complet de l'essai. Moderna est la première société à répondre ainsi aux appels pour plus de transparence. Elle a ainsi annoncé avoir recruté 25.296 participants sur l'objectif de 30.000 et 10.025 participants ont déjà reçu leur seconde dose, qui doit être injectée 28 jours après la première. Toutefois, la société ne prévoit pas de résultats avant le mois de novembre. L'autre essai de phase 3 en cours aux États-Unis est mené par Pfizer, et un troisième était conduit par AstraZeneca, jusqu'à que les essais mondiaux de ce vaccin soient suspendus le 6 septembre dernier. Les essais ont repris au Royaume-Uni, au Brésil et en Afrique du Sud, mais pas aux États-Unis, sans explication.

Ce manque de transparence est également dénoncé par des eurodéputés. Depuis quelques mois, la Commission européenne discute, et ce sans rien dévoiler de ses échanges, avec plusieurs laboratoires pharmaceutiques afin de se constituer un portefeuille diversifié de vaccins potentiels contre le Covid-19. Elle s’est déjà entendue avec AstraZeneca et le tandem Sanofi-GSK mais la seule déclaration faisant suite fut le nombre de doses de vaccins qu’elle réservait (300 millions dans les deux cas). De plus, rien n’a filtré de la teneur de ses échanges avec CureVac, Johnson & Johnson, Moderna, et le tandem BioNtech Pfizer. Côté européen, l’équipe de négociation, hormis sa présidente, est tenue secrète pour « qu’ils ne soient pas harcelés par les lobbys ».

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