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Décryptage de l’actualité internationale - Semaine du 18 janvier 2021

Responsable pédagogique : Fabien Despinasse


Dans un contexte sanitaire inédit, la pandémie a mis encore davantage en évidence la nécessité pour l’Union Européenne (UE) de jouer un rôle de premier plan dans la réponse aux crises et aux situations d’urgence mondiales. Cette perspective européenne, fondée sur des valeurs et des partenariats internationaux solides, sera primordiale pour relever les défis collectifs. La résilience et la solidarité sont les maîtres mots des présidences du Conseil de l’UE, malmenées par le Covid-19 ces derniers mois.


La présidence a pour rôle de donner une impulsion aux travaux législatifs du Conseil tout en maintenant la continuité du programme de l'UE et en veillant au déroulement harmonieux du processus législatif, ainsi qu’à une bonne coopération entre les États membres.

Elle est assurée à tour de rôle par chaque État membre pour une période de six mois [1]. Les États qui assurent la présidence travaillent en étroite coopération par groupes de trois, appelés "trios". Cependant, il ne suffit généralement pas de six mois pour mener à bien les réformes. C’est pourquoi le pays président mène pendant 18 mois une coopération particulièrement intense avec deux autres pays qui lui succéderont à la présidence du Conseil de l’UE. La présidence de l’Allemagne est aujourd’hui accompagnée de la Slovénie et du Portugal.


Les grandes priorités des présidences successives se sont réparties entre le développement du numérique, la cohésion sociale et le développement durable. Cependant les enjeux sécuritaires sont toujours présents sur le devant de la scène européenne, avec notamment les attaques terroristes ayant eu lieu en France, en Autriche et en Allemagne dernièrement.


I. Le bilan de la présidence allemande après plus de 6 mois de pandémie mondiale


L’Allemagne, à la tête de la présidence du 1er juillet au 31 décembre 2020, a dressé un bilan mitigé mais cependant ambitieux. La sécurité et la défense [2] y prennent une part non négligeable. La crise sanitaire a permis de mettre en lumière les dysfonctionnements de certains outils, et d'instaurer un schéma d’urgence opérationnel plus abouti. C’est dans ce cadre que l’Allemagne encourage et renforce la gestion civile des crises, élément central de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne. La réforme du Mécanisme de protection civile de l’Union (MPCU), intervient en ce sens en visant à mieux affronter les situations de crise. En créant à Berlin le Centre d’excellence européen pour la gestion civile des crises, le gouvernement fédéral apporte également une contribution importante dans ce domaine. Les États membres de l’UE y mettent en commun les connaissances acquises avec leurs partenaires et forment du personnel afin d’améliorer l’accomplissement des missions civiles de l’UE.

Dans le domaine de la politique de sécurité, l’Allemagne s’est appuyée sur une analyse des menaces, pour que les États-membres de l’UE aient des échanges sur des questions précises de sécurité et de défense et adoptent un cap commun. Elle a mené de longues négociations sur la « coopération structurée permanente ». De ce fait, à l’avenir, des pays non membres de l’UE pourront participer à certains projets de l’UE en matière de sécurité et de défense, ce qui aura aussi pour effet de renforcer le pilier européen de l’OTAN et la coopération entre l’UE et l’OTAN [3].

Une progression a été constatée, notamment en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, ainsi que dans la coopération policière, y compris au sujet du cyberespace. Ces points seront détaillés dans le programme du Portugal. À l’initiative de la présidence allemande, 15 États membres ont déjà nommé des points de contact centralisés pour les victimes du terrorisme.

De plus, un accord a été trouvé avec le Parlement européen au sujet d’un règlement pour lutter contre la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne, et il a été convenu d’améliorer l’échange d’informations sur les personnes potentiellement dangereuses. La menace émanant de l’extrémisme violent de droite et du terrorisme d’extrême droite, de la lutte contre les discours haineux et contre l’antisémitisme, a aussi permet d’adopter une déclaration du Conseil à ce sujet.


La sécurité intérieure et la coopération policière transfrontalière ont été davantage renforcées (notamment via un Partenariat européen des forces de police). Ceci a aussi posé les jalons pour l’avenir d’Europol et pour une lutte plus efficace contre le crime organisé, l’amélioration dans la mise en œuvre du mandat d’arrêt européen en faisant aussi partie.


II. Les contributions de la présidence Portugaise pour une sortie de crise commune


La présidence portugaise du Conseil de l’Union européenne (UE), qui couvrira de son côté la période allant de janvier à juin 2021, se tient à un moment particulièrement difficile, avec de nouvelles restrictions sanitaire et sécuritaires à l’horizon. Son programme s’inscrit volontairement dans une politique de continuité de sortie de crise [4], et fait suite au bilan dressé par l’Allemagne. La présidence participera au lancement de la mise en œuvre du nouveau Cadre Financier Pluriannuel (CFP), ainsi que l’instrument de l’UE pour la relance, (NextGenerationEU).


La politique européenne de sécurité et de défense et la coopération entre les États membres dans ces domaines feront également l’objet d’une attention particulière. Une réflexion sur la sécurité maritime, fondée sur la mise à jour de l’évaluation des menaces dans des zones maritimes pertinentes telles que le golfe de Guinée et l’Atlantique aura lieu. De ce fait, en mai, la présidence officialisera le lancement du Atlantic Centre[5] aux Açores.


Gestion des catastrophes et protection civile


La présidence contribuera à la mise en place d’un système ambitieux et complet de gestion des catastrophes dans l’UE, qui promeuve de manière intégrée et solidaire une plus grande résilience collective dans la réponse aux situations d’urgence, y compris le rapatriement de citoyens retenus dans des pays tiers. Le renforcement du mécanisme de protection civile de l’Union devra être poursuivi, ainsi que la création de réserves stratégiques de biens essentiels et au soutien de capacités militaires spécifiques en vue de permettre une réponse plus agile, plus souple et plus transversale aux catastrophes.

La priorité sera accordée au renforcement de la capacité de réaction commune et aux mécanismes qui complètent la solidarité des États membres, en augmentant la capacité de la réserve rescEU (protection civile et opérations d’aide humanitaire européennes) et en contribuant à l’enrichissement du réseau européen de connaissances en matière de protection civile. La coopération consulaire locale sera encouragée entre les États membres et les délégations de l’UE, en vue de se préparer aux situations de crise.


Coopération policière et judiciaire


Compte tenu de la complexité des défis posés par la criminalité transnationale en matière de sécurité et de justice, il sera important de veiller à la prévention, la formation, l’analyse commune des risques et à l’échange d’informations, ainsi qu’au renforcement de la coopération entre les États membres et les agences européennes et avec des pays tiers.

Le terrorisme étant un phénomène transversal, qui nous concerne tous et qui remet en cause les valeurs européennes fondamentales, nous nous efforcerons de mettre en oeuvre les initiatives européennes diverses et variées de lutte contre le terrorisme, y compris l’évaluation de la menace terroriste et extrémiste.

Dans le cadre de la coopération judiciaire en matière pénale et de la coopération policière, une place centrale sera accordée à la coordination de la lutte contre la criminalité organisée et transfrontalière, en particulier le trafic de stupéfiants, la traite des êtres humains, la cybercriminalité et les crimes de haine, ainsi qu’à la coopération et à l’échanged’informations dans le domaine des armes et des explosifs. Il sera organisé à Lisbonne une conférence de haut niveau sur la coopération policière entre l’UE et les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.


Sécurité et défense


En plus des travaux entrepris par l’Allemagne, un soutien sera apporté à la task force créée par le Service Européen pour l'Action Extérieure (SEAE) pour évaluer la réaction des forces armées des États membres à la pandémie, en identifiant les lacunes, les défis, les bonnes pratiques et les moyens d’améliorer la coopération et la coordination en réponse aux situations d’urgence complexes, y compris en ce qui concerne l’utilisation de capacités militaires.


Le partenariat UE-Afrique devra être renforcé en matière de sécurité et de défense dans le cadre d’une approche intégrée, globale et cohérente, en particulier dans le Sahel et le golfe de Guinée, en mettant l’accent sur le renforcement des capacités, en coopération avec les Nations unies et d’autres organisations multilatérales.


Le Portugal souhaite de plus l’intensification de la coopération européenne en matière de développement des capacités en vue de favoriser la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) et le rôle spécifique des PME. Une définition d’une approche commune pour l’économie européenne de la défense, qui s’appuiera sur une méthodologie inclusive, diversifiée et durable sera proposée en ce sens. L’opérationnalisation du Fonds européen de la défense est recommandée, en cherchant à l’orienter vers le développement de secteurs technologiques critiques. Dans ce contexte sera organisée en avril, à Porto, conjointement avec l’Agence européenne de défense, une conférence sur l’impact des technologies de rupture sur la sécurité et la défense.


Enfin, pour l’une des premières fois, le lien entre le changement climatique et la sécurité et la défense a été établi. L’inclusion, dans le cadre de la coopération structurée permanente, de critères exigeants pour l’adaptation au changement climatique, en proposant une feuille de route prévoyant l’adoption de mesures dans ce domaine.

Si nous abordons ici les aspects principalement sécuritaires des dernières présidences, c’est parce qu’ils restent des défis et des enjeux majeurs à maitriser au sein de l’espace européen. Les dernières présidences du Conseil de l’UE se rejoignent sur l’approfondissement commun des partenariats associant les institutions et les citoyens, en recherchant les meilleurs moyens pour faire avancer le processus de construction européenne et pour répondre aux attentes des populations. C’est en harmonisant l’évaluation de la situation et la mise en commun des ressources à disposition que l’UE pourra redevenir une entité supranationale forte et résiliente.

Ce sera bientôt le tour de la présidence française, de janvier à juin 2022 de mettre en œuvre cette continuité sur les plans sécuritaires et les processus de gestion de crises.

 

[1]Site internet du Conseil de l’Europe, informations mises à jour le 12/01/2021. Disponible en ligne sur : https://www.consilium.europa.eu/fr/council-eu/presidency-council-eu/

[2]Site officiel de la diplomatie allemande, article publié le 23/12/2020. Disponible en ligne sur : https://allemagneenfrance.diplo.de/fr-fr/-/2361110

[3]Le 05/11/2020, le Conseil Européen a voté la participation de pays tiers aux projets PESCO. Site officiel du Conseil Européen, mis à jour le 20/11/2020. Disponible en ligne sur : https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/defence-security/

[4]Site officiel de la Présidence du Portugal. Disponible en ligne sur : https://www.2021portugal.eu/en/

[5]Site officiel du Atlantic International Research Centre. Disponible en ligne sur : https://www.aircentre.org/

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